2030, 85% des métiers n’existent pas encore. Déjà, des tendances se dessinent. Les Experts Compétences navrés de voir la déconfiture actuelle de la formation professionnelle continue, alertent sur les enjeux de la France d’ici à 2030
- Former 1 milliard de personne d’ici 2030
- OF ! Avez-vous regardé du côté des métiers émergeants ?
- 2030, que devient la formation professionnelle continue ?
Scénario 2030 : à quoi ressemblera le paysage de la formation professionnelle en France ?
(le scénario probable et les décisions opérationnelles pour les OF, OPCO et DRH)
2030, que devient la formation professionnelle continue ?
1) Contexte court / moyen terme (2024–2027) : ce qui accélère la transformation
Plusieurs impulsions récentes structurent le « jour d’après » :
Des audits d’État et rapports ministériels (IGAS / IGF) recommandent de centraliser davantage la gestion des paiements et du contrôle de l’apprentissage et des dispositifs, en transférant certaines missions financières aux agences publiques (notamment l’ASP). L’idée : fiabiliser les flux, réduire les coûts de gestion et renforcer la lutte contre la fraude.
La réforme du financement de l’apprentissage 2025 a modifié les règles de prise en charge (NPEC, minorations selon modalités, etc.), créant une logique de priorisation par branches et une variabilisation des règles de financement.
Pressions budgétaires et appels à économies publiques (cour des comptes / feuille de route budgétaire) contraignent les marges des financeurs et poussent à rationaliser les structures intermédiaires.
Parallèlement, des affaires de fraude importantes (exploitation du CPF, réseaux de sociétés écrans) ont démontré les failles du modèle décentralisé, stimulant des réponses plus centralisées et des contrôles renforcés.
Ces éléments rendent probable un transfert effectif, progressif, des fonctions opérationnelles (paiement, gestion contractuelle, contrôles techniques) vers des structures publiques centralisées (ASP / guichet unique) d’ici 2027–2028, tandis que les OPCO perdent en partie leur rôle de « caisse » pour se recentrer sur l’ingénierie métier.
2) Scénario plausible à horizon 2030 (description synthétique)
A. Rôle des OPCO en 2030 : « experts-filières » et intégrateurs d’ingénierie
Les OPCO existent toujours, mais ont été transformés :
Missions conservées : appui aux branches, construction de stratégies de priorisation sectorielles, ingénierie de formation (certifications, parcours métiers), services conseil et animation de filières.
Missions transférées : gestion opérationnelle des paiements d’apprenticeship / comptes (vers l’ASP), rôle de payeur diminué, contrôles techniques centralisés.
Forme organisationnelle : consolidation (fusions partielles) pour créer des OPCO « élargis » couvrant plusieurs branches complémentaires ; adoption d’un modèle à deux étages : antennes métiers locales + centre d’expertise national.
Conséquence pratique : les OPCO deviennent des partenaires stratégiques pour les branches et entreprises mais moins des financeurs directs, d’où une dépendance accrue des OF sur des règles centralisées et des appels d’offres plus compétitifs.
B. Financement et gouvernance : plus de centralité publique
L’État / agences (ASP, France Compétences) pilotent davantage l’allocation des fonds et la traçabilité : guichet unique pour apprentissage, bases de données consolidées, contrôles automatisés.
Des règles nationales de priorisation coexistent avec marges de modulation par branche (20 % par exemple) pour tenir compte des spécificités sectorielles.
C. Fiscalité et charges : moins d’avantages sectaires
Les régimes fiscaux dérogatoires (TVA, etc.) des opérateurs ou certaines lignes budgétaires peuvent être revus — traduction : tensions sur les recettes des OPCO, remodelage de leurs business models.
D. Qualité & conformité : montée en puissance
Contrôles renforcés (data cross-check, IA de détection de fraude), exigences accrues sur la traçabilité pédagogique et l’impact (mesure d’employabilité).
Les certifications restent essentielles (Qualiopi révisée vers plus d’impact), et les OF devront produire preuves de performance (placements, montée en compétences mesurée).
3) Impacts concrets (OF / DRH / Opco / CFA)
Pour les OF
Pression concurrentielle accrue : appels d’offres plus stricts, sélection sur performance.
Besoins d’ingénierie prouvée : parcours certifiants, évaluations robustes, apprentissage blended.
Flux de trésorerie : paiement plus sécurisé mais processus de facturation / contrôle plus pointu ; nécessité d’industrialiser la conformité.
Risque pour les petits OF : sortie progressive du champ subventionné si incapacité d’adapter l’offre.
Pour les DRH / entreprises
Fluidification administrative (guichet unique) mais relations fournisseurs plus strictes : préférence aux OF référencés et aux parcours mesurables.
Possibilité d’un pilotage RH affiné via OPCO repositionnés en experts-filières.
Pour les OPCO
Recentrage métier : accompagnement stratégique, ingénierie, animation de branches.
Nécessité de se réinventer commercialement (prestations payantes, services à valeur ajoutée).
Pour les territoires & CFA
Renforcement du rôle stratégique pour les CFA dans les métiers en tension ; nécessité de partenariats locaux renforcés.
4) Trois trajectoires de détail (les « issues » probables) — et leur probabilité
Réforme ordonnée (probable — 55%)
Transfert progressif des paiements à l’ASP, réaffectation des OPCO en opérateurs d’ingénierie. Mesures de mitigation pour ménager le secteur (périodes de transition, accompagnement).
Impact : restructuration, mais continuité des financements.Consolidation forcée (possible — 30%)
Fusions d’OPCO, rationalisation plus agressive, suppression d’opérateurs jugés inefficients. Accent sur économies.
Impact : perte d’emplois internes OPCO, renforcement d’un paysage concentré.Choc réglementaire (moins probable — 15%)
Mesures brusques après scandales massifs (fraude) ou besoin d’économies drastiques : centralisation forte, rôle marginalisé des OPCO.
Impact : forte turbulence pour OF; nécessité d’un réalignement rapide vers marchés privés.
5) Recommandations pratiques — que faire dès maintenant (plan d’action 2026–2030)
A. Pour les organismes de formation (OF) — 6 priorités immédiates
Documenter l’impact pédagogique : mettre en place KPIs mesurables (emploi 6–12 mois, montée en compétences, taux de certification) ; archivage des preuves.
Industrialiser la conformité : process facturation, traçabilité CPF/contrats, audits réguliers.
Se spécialiser : choisir 2–3 niches métiers à forte tension pour capter priorisations de branche.
Construire des parcours certifiants : modularisés, hybrides, avec évaluations automatisées.
Tisser des partenariats OPCO / CFA / entreprises : codevelopper offres afin d’être référencé lorsque les OPCO externalisent l’ingénierie.
Diversifier les revenus : prestations privées, abonnements, services de conseil RH, e-learning B2B.
B. Pour les OPCO — repositionnement stratégique
Se transformer en centre d’expertise : offres de data analytics, priorisation sectorielle.
Monétiser certains services : ingénierie, études, accompagnement d’entreprises.
Conserver proximité : antennes locales maintenues pour le conseil opérationnel.
Moderniser les systèmes : API, interopérabilité avec l’ASP, transparence des données.
C. Pour les DRH / entreprises
Structurer des trajectoires compétences (GPEC renforcée) et co-financements.
Privilégier OF avec preuves d’impact et portefeuilles certifiants.
Sécuriser la chaîne documentaire (contrats, factures, preuve d’assiduité, évaluations).
6) Opportunités (pour ceux qui se préparent)
Les OF agiles et tech-savvy augmenteront leur part de marché (parcours hybrides, évaluations IA-driven).
OPCO expertisés pourront vendre des services à l’État et aux branches.
Entreprises proactives tireront parti d’un guichet unique simplifié pour piloter des politiques compétences efficaces.
7) Signes à surveiller (indicateurs d’alerte / confirmation)
Surveillez en particulier :
Publications IGAS / IGF et rapports de France Compétences sur les transferts de missions.
Textes interministériels et projets de loi de finances (modifications de TVA / régime fiscal).
Avis et calendriers du gouvernement concernant le transfert des paiements apprentissage à l’ASP (horizon 2027 mentionné dans plusieurs analyses).
Renforcement des dispositifs anti-fraude et enquêtes médiatiques (ils accélèrent la centralisation).
8) Message stratégique pour vos lecteurs (OF / Opco / DRH)
L’avenir des OPCO n’est pas la disparition pure et simple : c’est une mutation. D’ici 2030, les OPCO joueront davantage le rôle d’architectes de filière et moins celui de « banque de paiement ». Cette recomposition offre une fenêtre d’opportunité pour les organismes de formation qui accepteront de se réformer : preuves d’impact, industrialisation de la conformité, spécialisation métier, partenariats renforcés.
Pour les décideurs d’organismes de formation et les responsables formation en entreprise : ne subissez pas la réforme — anticipez-la. Le marché à venir rémunérera la qualité, la traçabilité et la capacité à livrer des parcours qui démontrent leur valeur sur l’emploi et l’économie locale.
Si cet article vous a plu, vous pouvez suivre les travaux des experts compétences en rejoignant le blog de la formation et vous inscrire à la Newsletter. Les experts compétences accompagnent tous les projets à forte composante numérique autour du Marketing, du Management et de la Formation. Ceci pour des organismes de formation comme pour les entreprises. Pour les contacter, laissez leur un message
Le blog de la formation propose des rubriques comme :
MOTS CLÉS
SOURCES