Pourquoi des OF restent dans le modèle subventionné ?

Après le dernier décret visant à réglementer la communication des NPEC, Les Experts Compétences trouvent que la main mise de l’état dans la gestion de leur entreprise devient carrément insupportable. Mais, ils ne sont pas dupent. Le secteur de la formation professionnelle est dopé aux subventions.

  1. Analyse du rapport sur l’usage des fonds de la FPC
  2. La formation doit-elle obéir à des normes
  3. Les normes en formation VS le secteur agricole
  4. OF : Retour sur le poids des normes
  5. Crise budgétaire : A qui profite l’excès de normes ?
  6. Les 2 maux qui tuent la formation professionnelle
  7. Instabilité, normes : comment avancer malgré tout ?
  8. Asphyxie et incohérences dénoncés par les OF 
  9. NPEC encore un décret qui tue.
  10.  Pourquoi les OF restent dans le modèle subventionné

Le décret de décembre 2025 plafonnant notamment les dépenses de communication intégrées aux NPEC n’est pas un simple ajustement technique. Il s’inscrit dans un mouvement plus large : la reprise en main progressive, centralisée et normative de l’économie de la formation professionnelle, y compris lorsqu’elle relève du secteur privé.

Pour beaucoup d’organismes de formation (OF), notamment ceux de taille intermédiaire (2 à 10 M€ de chiffre d’affaires), une question devient désormais incontournable :

Est-il encore possible de fonctionner, de se développer et de rester indépendant sans dépendre structurellement des subventions et financements publics ?

La réponse est moins simple qu’un oui ou non. Mais une chose est certaine : le modèle actuel atteint ses limites.

Pourquoi des OF restent dans le modèle subventionné ?

1. Un secteur devenu dépendant… puis piloté
La « drogue » des financements publics

Depuis plus de dix ans, le secteur de la formation a été incité – parfois contraint – à se structurer autour de financements publics ou para-publics :

  • financements mutualisés (Opco),
  • apprentissage et NPEC,
  • dispositifs régionaux ou nationaux,
  • aides exceptionnelles et mesures transitoires.

Cette logique a produit des effets positifs : professionnalisation, massification de l’alternance, sécurisation de l’accès à la formation.

Mais elle a aussi généré une dépendance structurelle :

  • marges construites sur des barèmes administrés,
  • stratégies commerciales alignées sur les règles de financement,
  • communication et recrutement indirectement subventionnés.

👉 Dès lors que l’État resserre le cadre, c’est toute l’économie du secteur qui vacille.

 

2. Le tournant actuel : de la régulation à la tutelle

Le plafonnement des frais de communication n’est pas anecdotique.

Il signifie implicitement que :

  • recruter un alternant,
  • attirer un public,
  • accompagner la mise en relation avec l’entreprise

ne doivent plus relever d’une stratégie économique libre, mais d’un cadre budgétaire administré.

Pour beaucoup d’OF, le sentiment est clair :

nous ne sommes plus seulement financés par la puissance publique, nous sommes pilotés par elle.

Ce glissement transforme le dirigeant d’OF en gestionnaire de contraintes réglementaires, au détriment de son rôle entrepreneurial.

 

3. Peut-on maintenir 2 à 10 M€ de CA sans subventions ?


Réponse courte : oui, mais pas avec le modèle dominant actuel.

Il existe des OF – y compris des CFA – qui y parviennent. Mais ils partagent des caractéristiques très différentes des structures « standards » du marché subventionné.

 

4. Les modèles qui fonctionnent (ou fonctionnent mieux)


1️⃣ Les OF orientés marché (B2B / compétences critiques)

Ces organismes :

  • vendent directement aux entreprises,
  • travaillent sur des compétences à forte valeur (management, numérique, réglementaire, métiers en tension),
  • raisonnent en retour sur investissement, pas en coût pédagogique.

Le financement public devient marginal, voire inexistant.

👉 Le prix n’est plus plafonné, mais justifié.

 

2️⃣ Les CFA hybrides

Certains CFA réussissent à :

  • maintenir une activité apprentissage,
  • tout en développant des activités hors alternance :
  • formations continues premium,
  • certifications privées,
  • prestations de conseil, d’ingénierie pédagogique ou RH.

L’apprentissage n’est plus le moteur unique, mais un levier parmi d’autres.

 

3️⃣ Les OF à marque forte

Ils ont investi sur :

  • une identité claire,
  • une expertise reconnue,
  • une capacité à attirer sans dépendre exclusivement de la publicité subventionnée.

Ces OF supportent mieux la réduction des budgets de communication, car leur attractivité ne repose pas uniquement sur l’achat de leads.

 

5. Sortir de Qualiopi : une fausse bonne idée ?

La tentation est réelle.

Ce que permet le refus ou l’abandon de Qualiopi

  • liberté totale de fixation des prix,
  • fin de la dépendance aux financeurs publics,
  • allègement administratif significatif.

Mais les conséquences sont lourdes

  • exclusion des financements Opco,
  • impossibilité de proposer de l’apprentissage financé,
  • recentrage obligatoire sur un marché solvable (entreprises, particuliers).

👉 Abandonner Qualiopi n’est pas une stratégie d’évitement, c’est un changement radical de modèle économique.

Les OF qui y survivent sont ceux qui ont :

  • une proposition de valeur très claire,
  • une capacité commerciale forte,
  • une clientèle prête à payer hors subvention.

 

6. Comment faire concrètement ?

Les leviers clés


🔹 Repenser la chaîne de valeur

Ne plus raisonner en heures financées, mais en :

    • résultats,
    • montée en compétences,
    • transformation mesurable.

🔹 Reprendre la maîtrise commerciale

    • prospection directe,
    • partenariats entreprises,
    • logique de compte clé,
    • cycles de vente assumés.

🔹 Diversifier les sources de revenus

    • blended learning premium,
    • abonnements entreprises,
    • licences de contenus,
    • accompagnement et conseil.

🔹 Accepter une décroissance transitoire

Sortir de la dépendance publique implique souvent :

    • une baisse temporaire du CA,
    • une restructuration,
    • un repositionnement stratégique.

👉 Mais cette décroissance peut être le prix de la souveraineté économique.

 

7. Mission impossible ? Non. Transformation difficile ? Oui.

La question n’est pas de savoir si l’État a raison ou tort. Le fait est là : le cadre se resserre, et il continuera de se resserrer.

Dans ce contexte, deux stratégies s’opposent :

  • s’adapter en permanence à un système de plus en plus administré,
  • ou reconstruire un modèle plus autonome, plus risqué à court terme, mais plus durable.

Les OF de taille intermédiaire sont à la croisée des chemins : trop gros pour bricoler, trop petits pour absorber indéfiniment les chocs réglementaires.

 

 Une question de choix, pas de nostalgie

Fonctionner sans subventions n’est pas un retour en arrière, ni un rejet idéologique. C’est un choix stratégique exigeant.

Le vrai sujet n’est pas de défendre un modèle ancien, mais de savoir si les dirigeants d’organismes de formation veulent rester :

  • des entrepreneurs responsables de leur stratégie,
  • ou des exécutants performants d’un cadre administré.

Le décret sur la communication n’est pas une exception. Il est un symptôme.

La question est désormais ouverte : combien d’organismes feront le choix de l’autonomie, et à quel prix ?

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