Comment Macron veut démolir la formation professionnelles ?

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Lors de la présentation de son programme présidentiel le 17 mars dernier, Emmanuel Macron a abordé la question de la formation professionnelle.

Il s’est engagé à « déréférencer les formations qui ne sont pas suffisamment qualifiantes et qui ne permettent pas de déboucher sur un emploi durable », insinuant ainsi que certaines formations seraient peu qualitatives. Pierre Courbebaisse, Président de la fédération des Acteurs de la compétence, revient sur ces annonces.

Comment Emmanuel Macron veut faire le ménage dans les formations professionnelles ?

Que pensez-vous de la proposition d’Emmanuel Macron de déréférencer certaines formations ?

Pierre Courbebaisse : Il y a un sujet qui apparaît primordial, c’est celui de l’amélioration de la lisibilité des résultats de la formation, en matière de diplôme mais aussi d’insertion. Qu’ils soient jeunes, salariés, demandeurs d’emploi ou même senior, les individus doivent choisir en connaissance de cause les formations qu’ils suivent, grâce à une information claire. Aujourd’hui, les Français jugent l’accès à la formation trop compliqué, trop administratif. Il n’y a quasiment pas de prestations d’orientation tout au long de la vie. Par exemple, les individus qui souhaitent se reconvertir sont trop peu accompagnés. Le déréférencement se fera naturellement quand ce problème sera résolu : si les individus sont bien informés, ils n’iront pas vers des formations qui ne débouchent sur rien !

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La formation professionnelle est un dispositif qui permet aux salariés, aux demandeurs d’emploi et aux jeunes de se former tout au long de leur vie, afin d’acquérir de nouvelles compétences, de se reconvertir ou de se qualifier. Elle représente un enjeu majeur pour l’emploi, la compétitivité et la cohésion sociale. Pourtant, le président de la République, Emmanuel Macron, semble vouloir la démolir, à travers une réforme qui remet en cause son financement, son organisation et sa qualité.

La réforme de la formation professionnelle, portée par la ministre du Travail, Elisabeth Borne, a été présentée en septembre 2022, dans le cadre du projet de loi « Avenir professionnel ». Elle vise à simplifier le système actuel, jugé trop complexe, trop coûteux et trop inefficace, en le recentrant sur les besoins des entreprises et des individus. Mais quels sont les principaux changements annoncés par cette réforme ? Et quelles sont les conséquences pour les acteurs de la formation professionnelle ?

– Un changement de modèle de financement : la réforme prévoit de supprimer les contributions obligatoires des entreprises au profit d’un système de bonus-malus, qui récompense les entreprises qui forment leurs salariés et pénalise celles qui ne le font pas. Elle prévoit également de fusionner les différents fonds de la formation professionnelle en un seul, géré par l’Etat, qui redistribuera les ressources selon des critères de performance et de qualité. Ces mesures visent à inciter les entreprises à investir davantage dans la formation de leurs salariés, mais elles risquent aussi de réduire les moyens disponibles pour la formation des demandeurs d’emploi et des publics fragiles.

– Une réorganisation des acteurs de la formation professionnelle : la réforme prévoit de supprimer les organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA), qui collectent et gèrent les fonds de la formation professionnelle, au profit de nouveaux opérateurs de compétences (OPCO), qui auront pour mission d’accompagner les entreprises dans la définition de leurs besoins en formation et de financer les formations certifiantes. Elle prévoit également de renforcer le rôle des branches professionnelles, qui devront définir les certifications et les référentiels de compétences de leur secteur. Ces mesures visent à simplifier le paysage de la formation professionnelle, mais elles risquent aussi de renforcer le pouvoir des employeurs au détriment des salariés et des organismes de formation.

– Une remise en cause de la qualité de la formation professionnelle : la réforme prévoit de déréférencer les formations qui ne sont pas suffisamment qualifiantes et qui ne permettent pas de déboucher sur un emploi durable, en s’appuyant sur des indicateurs de résultats et de satisfaction. Elle prévoit également de créer un système de certification unique, qui regroupera les diplômes, les titres professionnels et les certificats de qualification professionnelle (CQP), en les soumettant à des critères de qualité et de pertinence. Ces mesures visent à garantir la qualité de la formation professionnelle, mais elles risquent aussi de réduire l’offre de formation, de favoriser les formations courtes et standardisées, et de dévaloriser les formations non-certifiantes.

La réforme de la formation professionnelle voulue par Emmanuel Macron est donc loin de faire l’unanimité. Si elle affiche l’ambition de rendre la formation professionnelle plus simple, plus efficace et plus accessible, elle suscite aussi de nombreuses critiques et inquiétudes de la part des acteurs de la formation professionnelle, qui craignent qu’elle ne conduise à une dégradation de la qualité de la formation, à une perte de diversité de l’offre de formation, et à une remise en cause des droits des salariés et des demandeurs d’emploi à se former.

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